QU'EST-CE QU'UN CHANTIER VERT ?
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Pour un chantier de construction, réduire les nuisances environnementales répond à deux objectifs, selon deux échelles :
celle du chantier et de sa proximité. Il sagit alors des nuisances ressenties par les usagers, extérieurs ou intérieurs au chantier : le personnel du chantier, les riverains, les occupants dans le cas de réhabilitation, les usagers de la voie publique. Ces nuisances sont par exemple le bruit, les salissures, les circulations, les stationnements,
celle de latteinte à lenvironnement et à la population en général. Lobjet est alors de préserver les ressources naturelles et de réduire limpact des chantiers sur lenvironnement. Cet objectif revêt une importance particulière au regard des nuisances provoquées par lensemble des chantiers de bâtiment, surtout en termes de déchets produits et de pollutions induites.
On distingue trois types de cibles pour la mise en uvre dactions de gestion et de réduction des nuisances environnementales :
les flux entrants du chantier : engins et matériels utilisés sur le chantier, matériaux et produits mis en uvre...
le chantier lui-même : techniques employées, organisation du pré-tri...
les flux sortants du chantier : déchets évacués, nuisances générées vis-à-vis des riverains...
Réduire toutes ces nuisances, dans les contraintes économiques difficiles de la construction, peut sembler une gageure. Cependant, tous les acteurs sont concernés, chacun peut y trouver un intérêt propre. La maîtrise douvrage répond ainsi mieux aux besoins de ses clients et de la collectivité dont elle dépend ; la maîtrise duvre peut proposer des améliorations globales à un moindre coût ; lentreprise travaille différemment ce qui peut devenir un atout, pour elle, vis-à-vis de la concurrence.
Nuisances perçues par les usagers et les riverains du chantier
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La présence dun chantier, surtout en site urbain, peut induire dans un quartier de multiples nuisances quil convient de minimiser. Leur réduction permet en outre de limiter les problèmes de sécurité associés et les plaintes déposées par les riverains.
La sensibilité des riverains à des nuisances plutôt quà dautres dépend des personnes (catégorie socioprofessionnelle, âge, locataire ou propriétaire, ancienneté dans le quartier, habitant ou professionnel...), de leur expérience en matière de vécu de chantier et du type de quartier, du type dhabitat (isolation acoustique, date du dernier ravalement...). Aussi, préalablement au démarrage du chantier, cette sensibilité doit être étudiée, par le biais denquêtes, afin de la prendre en compte autant que possible.
Il est impératif de prendre connaissance des textes réglementaires, y compris municipaux, pouvant concerner les chantiers. De plus, des contacts doivent être établis avec les services municipaux pour examiner les points qui peuvent être traités en concertation et bénéficier, le cas échéant, des compétences humaines et des ressources matérielles de ces services.
Les salissures et poussières
En phase terrassement et pendant les autres phases du chantier par temps de pluie, les sorties dengins et de camions sur la voie publique provoquent des dépôts de boue. En plus des nuisances visuelles dues à la saleté de la chaussée, se posent des problèmes de sécurité. La chaussée devient glissante et les risques daccident sont accrus.
Article 99.7 du Règlement sanitaire départemental type (Circulaire du 9 août 1978) concernant les abords des chantiers : "Les entrepreneurs des travaux exécutés sur la voie publique ou dans les propriétés qui lavoisinent doivent tenir la voie publique en état de propreté aux abords de leurs ateliers ou chantiers et sur les points ayant été salis par suite de leurs travaux".
Les émissions de poussières, souvent importantes lors du remplissage des silos à ciment en phase gros uvre et dans le cadre dune rénovation, sont en général mal perçues.
Article 96 du Règlement sanitaire départemental type (Circulaire du 9 août 1978) concernant la protection des lieux publics contre la poussière : "...toutes les opérations dentretien des habitations et autres immeubles ainsi que les travaux de plein air seffectuent de façon à ne pas disperser de poussière dans lair, ni porter atteinte à la santé ou causer une gêne pour le voisinage".
Les palissades
Les palissades en bac acier habituellement utilisées pour clôturer les chantiers subissent des dégradations qui nuisent
à leur aspect. Cela ne contribue pas à
donner une image propre du chantier et constitue une nuisance visuelle pour les
passants. Ces dégradations sont provoquées par des passants curieux, des collages daffiches, des graffitis. En outre, quand les palissades sont trop basses, des déchets encombrants sont souvent déposés par des particuliers dans les bennes du chantier.
Toutes ces nuisances induisent des coûts supplémentaires de réparation des clôtures et de gestion des déchets.
Article 99.7 du Règlement sanitaire départemental type (Circulaire du 9 août 1978) concernant les abords des chantiers : "Les chantiers ouverts sur la voie publique ou en bordure de celle-ci doivent être entourés de clôtures assurant une protection et une interdiction de pénétrer efficaces".
Les circulations
La circulation dengins de chantier, de camions de livraison, de véhicules des différentes entreprises, accroît sensiblement le trafic aux environs du chantier. Les gros engins posent des problèmes dencombrement et de sécurité. Cette gêne est ressentie de façon plus aiguë en site urbain, dans les rues étroites, à proximité dune école, les heures et jours daffluence (entrée et sortie du travail, jours de marché...).
Lincommodité due à laugmentation de trafic sétend au-delà des abords immédiats du chantier. Les moyens pour canaliser ce trafic doivent être recherchés avec les administrations concernées.
Les stationnements
Les véhicules privés des compagnons, les fourgons et autres véhicules professionnels des entreprises, les camions de livraison en attente dentrer sur le chantier sont autant de véhicules supplémentaires à garer dans le quartier. Le stationnement de ces véhicules en bordure de chantier encombre les circulations et induit des risques daccidents. Loccupation des places de stationnement habituellement utilisées par les riverains et autres usagers les gêne dans leur vie quotidienne. La raréfaction des possibilités de stationnement peut par ailleurs porter préjudice aux commerces voisins.
La recherche demplacements de stationnement pour les véhicules du chantier doit être menée avec la municipalité.
Les bruits
Les nuisances acoustiques concernent à la fois les riverains, les occupants et le personnel de chantier. Elles peuvent nuire au confort et à la santé, ainsi que troubler les activités du quartier (écoles, hôpitaux...). Elles sont aujourdhui à lorigine de nombreuses plaintes auprès des services municipaux.
Des textes réglementaires municipaux ou préfectoraux exigent fréquemment le respect de niveaux sonores maximum en limite de chantier selon des plages horaires précises, dont il convient de senquérir avant le démarrage du chantier.
Selon larticle R 48-5 du Code de la santé publique résultant du Décret n°95-408 du 18 avril 1995 relatif à la lutte contre les bruits de voisinage, sera en infraction "...toute personne qui, à loccasion de chantiers de travaux publics ou privés et de travaux intéressant les bâtiments et leurs équipements soumis à une procédure de déclaration ou dautorisation, aura été à lorigine dun bruit de nature à porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de lhomme et qui : soit naura pas respecté les conditions dutilisation ou dexploitation, de matériels ou déquipements, fixées par les autorités compétentes ; soit aura négligé de prendre les précautions appropriées pour limiter ce bruit ; soit aura fait preuve dun comportement anormalement bruyant".
Chaque chantier est spécifique en matière démissions acoustiques selon les techniques constructives choisies et lenvironnement du chantier ; de plus celles-ci évoluent au fur et à mesure des travaux.
Les nuisances acoustiques sont générées par des engins, matériels et travaux bruyants, ou sont dues à un mauvais positionnement de la source (vibrations, absence décran...). Les éclats de voix des compagnons constituent également une gêne pour les riverains.
La réglementation nationale relative à la limitation des émissions sonores des matériels et engins de chantier est constituée par lArrêté du 11 avril 1972. Celui-ci couvre tous les matériels et engins à moteur thermique utilisés sur les chantiers, à lexception des catégories visées par les directives européennes telles que les moto-compresseurs, les groupes électrogènes, les brise-béton et les marteaux-piqueurs, etc. Une procédure dhomologation française et une procédure européenne cxistent donc actuellement en France pour les matériels et engins de chantier. Les engins très anciens, construits avant la date dentrée en vigueur de la réglementation les concernant, ne peuvent être utilisés à moins de 100 m des bâtiments dhabitation et professionnels.
La Loi 92-1444 du 31 décembre 1992, relative à la lutte contre le bruit, prévoit dans son article 2 que tous les objets susceptibles de provoquer des nuisances sonores élevées doivent être insonorisés et homologués. Le Décret dapplication 95-79 du 23 janvier 1995, concernant les objets bruyants et les dispositifs dinsonorisation, renvoie à des arrêtés le soin de fixer, catégorie par catégorie de matériels, les niveaux limites admissibles et la mesure correspondante. Les nouvelles dispositions concernent principalement les contrôles et surtout les sanctions, qui sont notablement renforcées, car il est désormais possible de saisir les matériels non conformes.
Les niveaux de bruit
Les niveaux de bruit élevés sur un chantier peuvent altérer rapidement, et souvent irréversiblement, les capacités auditives des compagnons. Il faut chercher à les réduire et inciter les compagnons à porter des protections individuelles.
Les dispositions du Code du travail sappliquent en matière de protection des travailleurs contre le bruit sur les chantiers, en particulier larticle L. 231-8 et les articles R. 232-8 à R. 232-8-7. Lemployeur est tenu de réduire le bruit au niveau le plus bas possible compte tenu de létat des techniques, le niveau dexposition au bruit devant être compatible avec la santé des travailleurs (protection de louïe). Lorsque lexposition sonore quotidienne subie par un travailleur ou la pression acoustique de crête dépassent respectivement 90 dB (A) et 140 dB, un programme de mesures de nature technique ou dorganisation du travail, destiné à réduire lexposition au bruit, doit être établi et mis en uvre par lemployeur. Des dispositions doivent être prises pour que des protecteurs individuels soient utilisés, ces derniers devant être mis à disposition lorsque les niveaux précédents dépassent respectivement 85 dB (A) et 135 dB.
Les travaux exposant à un niveau de bruit supérieur à 85 décibels nécessitent une surveillance médicale spéciale (Article 1er de lArrêté du 11 Juillet 1977). De plus, certains travaux tels que lutilisation de pistolets de scellements, le sciage de matériaux minéraux, lutilisation dengins de chantier bruyants (chargeuses, pelles mécaniques, etc.), font partie des travaux exposant aux bruits lésionnels, dont les affections sont considérées comme des maladies professionnelles (Tableau 42 des maladies professionnelles du Code de la sécurité sociale et Décret n°55-806 du 17 juin 1955).
Une modification des comportements doit être envisagée ; ceux-ci peuvent varier très largement de même que les bruits associés, pour la réalisation dune même tâche. Par exemple, un compagnon tape trois fois plus sur un serre-joints mal nettoyé que sur le même bien entretenu ; de même il lui est inutile de frapper la cuve dune centrale à béton maintenue propre depuis lorigine pour en détacher la laitance.
La nocivité des produits et techniques
Sur les chantiers sont mis en uvre des matériaux, des produits et des techniques pouvant parfois présenter des risques vis-à-vis de la santé des compagnons, notamment quand ces mises en uvre se répètent fréquemment pendant leur carrière. Les recenser avant le début des travaux permet de les remplacer par déventuels substituts moins nocifs ou au minimum de mieux organiser la protection des compagnons.
Quelques exemples : remplacer les colles à base de solvants organiques par des colles à base de résines acryliques, dun coût plus élevé mais obtenant un résultat technique équivalent ; remplacer les peintures glycérophtaliques, polluantes et dégageant une forte odeur par des peintures en phase aqueuse, mais leurs qualités techniques et leur durabilité doivent être encore étudiées ; remplacer les huiles minérales de décoffrage, à lodeur forte et tenace, par des huiles à base végétale.
Autre exemple en réhabilitation et en démolition, la dépose des couvertures en amiante-ciment doit faire lobjet de précautions particulières. Les opérations de démolition pouvant générer des quantités importantes de poussières, chutes et bris de plaque doivent être évitées. Il faut privilégier le démontage des matériaux en place, procédure facilitant le tri sélectif. Si le démontage est impossible, il est alors recommandé darroser la zone démolie pour limiter la dissémination de poussières dans lenvironnement immédiat du chantier.
(Voir la Recommandation relative à la dépose damiante-ciment à paraître dans les cahiers du CSTB et les publications de lOrganisme Professionnel de Prévention du BTP - OPPBTP.)
Dans le cas dune dépose, le Décret n°96-98 du 7 Février 1996, relatif à la protection des travailleurs contre les risques liés à linhalation de poussières damiante, impose lélaboration dun plan de démolition et, sauf impossibilité technique, un retrait préalable des matériaux en amiante avant démolition. Ce Décret donne comme valeur limite dexposition pour les utilisateurs de produits en amiante-ciment 0,1 f/cm3 sur une heure de travail.
La protection de lenvironnement et de la santé est depuis quelques années au centre des choix stratégiques des acteurs de la construction locaux, nationaux, européens, voire internationaux. La production de matériaux et de produits pour le bâtiment, leur mise en uvre, leur usage et maintenance, leur recyclage ou lélimination des déchets induits peuvent avoir un impact environnemental important et des effets éventuels sur la santé.
La pollution des sols et des eaux
Au cours dun chantier, en labsence de précautions particulières, diverses substances liquides sont susceptibles dêtre déversées sur le sol et dêtre entraînées vers les nappes phréatiques, générant des pollutions parfois difficiles à résorber. De même, le rejet, dans les réseaux de collecte et dévacuation des eaux pluviales et des eaux usées, de solvants et autres produits dangereux est susceptible de créer des pollutions importantes. Il peut aussi endommager les réseaux et les installations de traitement des eaux usées. En outre, ces substances peuvent nuire à la santé du personnel dexploitation. Aussi des systèmes de rétention et de collecte de ces produits sur le chantier, en vue de leur élimination conforme à la réglementation, doivent être prévus.
Larticle L35-8 du Code de la Santé Publique interdit le déversement deaux usées, autres que domestiques, dans les égouts publics sans autorisation préalable de la collectivité.
Le Règlement sanitaire départemental type (Circulaire du 9 août 1978) interdit dans son article 29.2 dintroduire directement, dans les ouvrages publics dévacuation des eaux pluviales et usées, toute matière, notamment les hydrocarbures, susceptible dinduire un danger pour le personnel dexploitation des ouvrages dévacuation et de traitement des eaux, de dégrader ces ouvrages ou de gêner leur fonctionnement. De plus dans son article 90, il interdit les déversements ou dépôts de matières usées ou dangereuses dans les voies, plans deau ou nappes.
Quand le béton est fabriqué sur le chantier, le sol et les nappes phréatiques peuvent être pollués par les eaux de lavage de la centrale, constituées de laitance et de résidus de béton. Des systèmes de récupération et de décantation de ces eaux doivent être prévus. Par ailleurs, il faut empêcher le déversement de laitance de béton dans les réseaux, qui peuvent à terme être obstrués après séchage.
Quant aux huiles de décoffrage, leur application ne fait aujourdhui lobjet daucune précaution particulière, tant en termes de ratios de consommation que de mesures de protection des sols sur les lieux de remplissage des pulvérisateurs et denhuilage des banches. Des études préliminaires de vulnérabilité du terrain devraient être systématiquement menées afin de préciser les mesures à prendre pour limiter ces pollutions.
Le Décret n°77-254 du 8 mars 1977 interdit le déversement, par rejet ou après ruissellement sur le sol ou infiltration, des huiles (huiles de graissage etc.) et lubrifiants neufs ou usagés dans les eaux superficielles, souterraines et de mer.
Larticle 2 du Décret n°79-981 du 21 novembre 1979 oblige les détenteurs dhuiles minérales ou synthétiques usagées, provenant de leurs installations et accumulées dans leur propre établissement en raison dactivités professionnelles, à les recueillir et les stocker en évitant notamment les mélanges avec de leau ou tout autre déchet non huileux.
Ils doivent les conserver dans des installations étanches jusquà leur ramassage ou leur élimination.
Les déchets
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Les enjeux
Comme les activités industrielles, lactivité Bâtiment consomme des ressources naturelles et génère des quantités non négligeables de déchets.
Quantification des déchets de construction et de réhabilitation
En milliers de tonnes
Construction
Réhabilitation Dépose
Réhabilitation Construction
Total
"INERTES"
1 879
6 578
527
7 105
DIB*
204
2 745
131
2 876
EMBALLAGES (DIB*)
169
0
127
127
DIS**
57
1 177
94
1 271
TOTAL
2 309
10 500
879
11 379
* DIB : Déchets Industriels Banals, **DIS : Déchets Industriels Spéciaux.
Source : Déchets de chantier. Quantification nationale, FNB - ADEME, janvier 1996.Les déchets de chantier de bâtiment, y compris ceux issus de la démolition, représentent au total environ 31 millions de tonnes produites par an, soit léquivalent du tonnage annuel des ordures ménagères.
Ils se répartissent de la façon suivante par type de chantier :
- Démolition 17 344 kt
- Construction 2 309 kt
- Réhalilitation-construction 879 kt
- Réhabilitation-dépose 10 500 kt
Les déchets de démolition et de dépose se caractérisent donc par un volume et un poids très nettement supérieurs à ceux des autres déchets de chantier. Les déchets issus de la construction neuve et de la reconstruction sont souvent "propres" ou pourraient lêtre sils étaient triés à la source (notamment les emballages). Ils proviennent dune multitude de produits et matériaux, générés en faibles quantités ; leur gisement est variable dans lespace et dans le temps, au gré des chantiers.
Lélimination de lensemble des déchets de chantier représente aujourdhui environ 2 % du chiffre daffaires global du secteur Bâtiment, soit environ 9 milliards de F HT. Ce chiffre ne cesse daugmenter en raison de laccroissement des coûts de traitement ou de stockage des déchets : lenjeu économique est important.
La Loi n°92-646 du 13 juillet 1992 (modifiant la Loi 75-633 du 15 juillet 1975 relative à lélimination des déchets et à la récupération des matériaux) définit le responsable de lélimination des déchets : cest leur producteur ou leur détenteur. Elle précise en outre quà compter du 1er juillet 2002, les installations de stockage des déchets ne seront autorisées à accueillir que des déchets ultimes.
La deuxième version du Guide relatif aux Déchets de Chantier à lUsage des Professionnels du Bâtiment, auquel ont notamment participé les Ministères du Logement et de lEnvironnement, la FNB, lADEME et le CSTB, fait le point sur lensemble de la question des déchets de chantier et sera disponible auprès des organismes sus-cités dici fin 1997.
Laccroissement des exigences de la réglementation, notamment la Loi du 13 juillet 1992, rend nécessaire la maîtrise des flux de déchets. Face à léloignement et à la raréfaction des installations de stockage, aux coûts sans cesse croissants du stockage et des taxes, il est indispensable de réduire la production des déchets à la source, puis de privilégier le traitement et la valorisation par réemploi, réutilisation, recyclage ou valorisation énergétique. Ces deux démarches sont devenues des priorités incontournables.
La gestion des déchets générés sur un chantier de construction ou de réhabilitation de bâtiment peut senvisager selon trois axes : une réflexion sur les flux entrants, une réflexion sur les flux sortants et une réflexion sur les aspects techniques et organisationnels des solutions mises en uvre sur le chantier.
Les flux entrants
Le mode dapprovisionnement des matériaux et produits sur un chantier influe sur les quantités de déchets générées du fait des quantités approvisionnées à chaque livraison, des dimensions des matériaux et produits proposés par le fabricant, de leur conditionnement. Par exemple, une quantité de matériaux et produits inadaptée aux moyens dentreposage disponibles sur le chantier induit des risques de dégradation et de casse, sources de déchets.
Une réflexion commune est nécessaire entre les fabricants des produits et matériaux du bâtiment et les entreprises qui les mettent en uvre. Elle doit porter sur létude de systèmes de conditionnement réduisant au maximum les quantités demballages, notamment ceux non réutilisables et difficiles à valoriser, tout en prenant en compte les contraintes liées à la manutention et à lorganisation sur le chantier. Les produits pourraient par ailleurs être conçus de façon à minimiser les chutes de mise en uvre, ce qui dépend de ladéquation des dimensions de chaque unité à lemploi envisagé.
Les aspects techniques et organisationnels sur le chantier
Réduction de la production de déchets
Une politique de gestion des déchets de chantier doit, tout dabord, viser une réduction à la source en quantité et en toxicité, suivie dune valorisation des déchets quand des filières locales le permettent.
Par ailleurs, une minimisation des casses et dégradations diverses repose, pour une grande part, sur le choix de moyens logistiques souvent simples auxquels il convient de réfléchir dès la phase de préparation de chantier.
Des actions doivent également être menées au niveau de la conception des bâtiments. Le choix des techniques mises en uvre et des produits et matériaux utilisés, influe sur les quantités et natures de déchets plus ou moins aisés à valoriser et plus ou moins nocifs : calepinage, précision des plans et des réservations,... Ces différents points doivent faire lobjet dune réflexion entre le concepteur et les entreprises. Chaque corps de métier doit envisager de nouvelles méthodes permettant de produire moins de déchets.
Témoignage : Philippe PINTIAUX - SA HLM SLE de Lille - Maître dOuvrage
Michel VANLERBERGHE, OTH - Bureau dEtudes Techniques
Chantier Vert de Wambrechies
Une source déconomies
"Un bailleur-social est très soucieux de lanalyse de la valeur ; or il est conscient quune préparation rigoureuse des chantiers et une gestion des déchets permettent de réaliser des économies.
Limiter les déchets à la source apporte une économie sur le coût de construction et facilite lobtention dun chantier propre. Nous avons choisi de réduire les déchets, particulièrement volumineux, des cloisons de doublage en pratiquant un calepinage précis des panneaux à poser. Les entreprises travaillant en corps détat séparés y ont été sensibilisées bien avant le démarrage du chantier. Avant tout, les différents chefs de chantier doivent saccorder entre eux et chacun doit vraiment adhérer à la démarche.
Dune façon générale, les chantiers "verts" ne doivent pas être des projets de "cols blancs". Ils doivent être préparés par des personnes qui connaissent le chantier et ceux qui y travaillent. Et ils doivent engendrer une méthodologie reproductible."
Ces aspects techniques et organisationnels, qui influent sur la production de déchets, font partie intégrante dune démarche globale sur la qualité. Tous les acteurs du chantier, concepteur, personnel dencadrement, compagnons, doivent y être sensibilisés.
Pré-tri des déchets
Trier les déchets à la source, sur le chantier, est plus aisé que les trier après mélange et évite les souillures potentielles. Le niveau de tri à retenir est fonction du type et de la taille du chantier, des infrastructures et des filières de valorisation locales. Le degré de tri sera donc différent dune région à une autre comme dun chantier à un autre sur une même commune.
Dans tous les cas de figure, les DIS (Déchets Industriels Spéciaux) doivent déjà être séparés ; un tri entre les déchets "inertes" et les DIB (Déchets Industriels Banals) devait être systématiquement envisagé.
Les flux sortants du chantier
La pratique actuelle consiste à envoyer la quasi-totalité des déchets générés sur les chantiers en installation de stockage. Elle ne pourra évoluer quen fonction des mises en place de centres de tri et regroupement et de filières de valorisation, en complément de centres de stockage.
Cette nécessaire croissance du recours à la valorisation, à la place du stockage, concerne lensemble des déchets issus de chantiers : matériaux, produits et équipements. Tous les acteurs professionnels sont concernés du maître douvrage à lindustriel, ainsi que les collectivités et les pouvoirs publics locaux qui élaborent les plans départementaux ou régionaux délimination des déchets. Une réflexion tant nationale que locale simpose.
Caractéristiques actuelles des types dinstallations de stockage de déchets
Type de stockage |
Type de déchets industriels acceptés |
Contrôle de la composition des déchets |
Coût en FHT/t |
Classe I |
Déchets Industriels Spéciaux (essentiellement solides, minéraux, stabilisés à court terme) |
Test de lixiviation Limitations sur : PH, partie organique et biologique ..... |
de 450 à 1100* |
Classe II |
Déchets Industriels Banals |
Contrôle visuel |
de 100 à 350 |
Classe III |
Déchets "Inertes" |
Contrôle visuel |
de 0 à 80 |
* Le coût ne comprend pas le pré-traitement ou la stabilisation.
Deux textes réglementaires concernant directement les déchets de chantier sont en
préparation au Ministère de lEnvironnement :
un décret relatif aux différentes catégories de déchets classés en fonction de leurs propriétés de danger,
un arrêté ministériel relatif aux décharges existantes et aux nouvelles installations de stockage de déchets ménagers et assimilés (classe II).
En outre le Décret 94-609 du 13 juillet 1994, relatif aux déchets demballage dont les détenteurs ne sont pas les ménages, oblige les entreprises produisant des déchets demballages industriels et commerciaux à les (faire) valoriser. Ils doivent par ailleurs être stockés sur le chantier dans des conditions propres à favoriser leur valorisation ultérieure. La seule exception concerne les entreprises produisant moins de 1 100 litres par semaine et utilisant, pour les éliminer, les services de collecte des ordures de la commune.
Le brûlage sauvage des déchets sur le chantier ou en dehors est interdit (article 84 du Règlement sanitaire départemental type et article 7 de la Loi 75-633 du 15 juillet 1975 modifiée). Les déchets doivent être éliminés par des opérateurs autorisés, le plus souvent dans des installations classées (Loi 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de lenvironnement).
Pour aller dans le sens de la réglementation, il convient, avant le démarrage des travaux, de rechercher les possibilités locales et économiquement viables de valorisation des déchets.
La différenciation des flux sortants dépend de lexistence de filières spécifiques viables et de la possibilité de trier le matériau correspondant à la filière. Pour ce faire, il est nécessaire de consulter en amont, dune part, des organismes locaux comme les DRIRE, les Délégations régionales de lADEME, les Fédérations locales du BTP et les CAPEB départementales, dautre part, les Plans régionaux et départementaux délimination des déchets, et les plans spécifiques aux déchets de chantier quand ils existent.
La comparaison entre plusieurs filières pour un même déchet est effectuée sur les critères suivants :
intérêt de linterlocuteur pour la démarche,
prix de reprise du matériau,
distance du chantier au siège de lentreprise de récupération,
possibilité et prix de location du matériel de stockage,
coût du transport,
polyvalence (récupération de plusieurs types de déchets),
collaboration avec un autre récupérateur ou avec un sous-traitant,
prestation de service (dépose de matériel en réhabilitation).
La cotation de ces critères peut être ramenée à une évaluation économique.
RÉUSSIR UN CHANTIER INTÉGRANT LENVIRONNEMENT
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Le programme "Chantiers Verts" a permis de mettre en évidence des solutions techniques et des méthodes organisationnelles, pour répondre aux nouveaux enjeux environnementaux des chantiers de construction neuve ou de réhabilitation. Ces solutions et méthodes sont présentées dans les fiches dopération jointes à ce document.
Les réalisations expérimentales ont aussi été loccasion de développer la réflexion de lensemble des acteurs de la construction, sur le rôle quils pourraient ou devraient jouer dans un processus complet de prise en compte de lenvironnement sur les chantiers.
Sont proposées, dans cette partie du document, quelques pistes prospectives sur les moyens daction à mettre en uvre, à chaque phase dun projet, pour que la gestion de la qualité environnementale des opérations de construction ne soit plus un vu pieux mais puisse devenir une réalité accessible. Toutes nont pu être testées sur le terrain mais ces suggestions sont le résultat dobservations critiques et déchanges multiples avec les équipes et les suiveurs des Chantiers Verts.
Les bénéfices attendus
Les impacts environnementaux seront demain une préoccupation majeure pour tous : pouvoirs publics, acteurs de la construction, médias et société. Apprendre dès maintenant à les prendre en compte pour mieux les maîtriser sera une source déconomies et de plus-values pour les professionnels du bâtiment.
Limage et le savoir-faire
Respecter les hommes et lenvironnement devient aujourdhui une obligation, notamment sous la pression des médias et de lopinion publique. Lensemble des métiers du bâtiment a tout à gagner en affichant une volonté constante dans la réduction des nuisances sur le chantier.
Le maître douvrage pourra, autour de ce thème, développer limage dun décideur et gestionnaire averti de son patrimoine et de ses usagers. Communiquer autour du chantier, solliciter des solutions aux problèmes du bruit, autant didées pour limiter les mécontentements et donc les plaintes. La maîtrise duvre devra être aussi au cur du nouveau dialogue bâtiment-environnement. Les REX Haute Qualité Environnementale le montrent (cf. document réalisé sur les REX HQE par le PCA et le CSTB). Quant à lentreprise, elle est la plus à même dexploiter ses compétences et ses connaissances techniques et organisationnelles pour proposer des solutions positives aux problèmes posés par les chantiers à leur environnement. Cette thématique encore originale lui donne loccasion de revaloriser le métier des hommes quelle emploie et ses propres réalisations.
La qualité et les conditions de travail
La prise en compte de lenvironnement sur le chantier nest pas sans répercussions sur la qualité de la réalisation des travaux, ni sur les conditions de travail des compagnons. Elle renforce la préparation du chantier, qui est primordiale pour réduire le nombre de défauts et derreurs. Elle affine la programmation en obligeant à prévoir de nouvelles prescriptions. Elle intervient sur la logistique des engins de chantier et la mécanisation de tâches jusqualors négligées, non comptabilisées et pénibles. En améliorant la propreté du chantier, de ses accès et des circulations, elle peut contribuer à la réduction des accidents de travail. Elle permet, enfin, dintroduire de nouvelles pratiques ou de nouveaux matériaux ou procédés.
Les opérations expérimentales lont prouvé : loptimisation de la gestion de lenvironnement va dans le sens dune meilleure qualité des réalisations. Par exemple, réduire la quantité de déchets produite par le chantier, en soignant les réservations et en procédant au calepinage, génère une limitation des reprises, donc une diminution de la non-qualité et de ses coûts induits dans le processus de construction, et un gain de temps.
Ces améliorations dans le processus de construction se répercutent aussi sur la qualité du produit final lui-même, en optimisant les délais de réception des bâtiments et leur exploitation.
La réglementation et les coûts
Lenvironnement du chantier nest pas seulement une question dimage. Lévolution des réglementations mais aussi des contraintes technico-économiques, telles que celles du secteur de lélimination des déchets, tend à générer des augmentations de coûts sur les chantiers qui ne pourront plus être supportés par les seules entreprises.
En 1996, le prix de la tonne de déchets "inertes" triés en installation de stockage de classe III varie entre 0 et 80 F, tandis que le prix de la tonne de déchets non triés en classe II coûte entre 100 et 350 F, soit en moyenne quatre fois plus cher. De même les éventuels retards, dus à des restrictions horaires (localement réglementées) pour le bruit des engins, sont une incitation à la recherche de solutions moins bruyantes. Le nettoyage des abords, la diminution des poussières, la réduction de la pollution des sols et des eaux, la communication avec les riverains sont dautres façons de mieux intégrer un chantier dans son environnement ; elles peuvent apporter des retours profitables aux investissements consentis.
Ces exemples illustrent bien lintérêt de développer très rapidement lensemble des solutions visant à optimiser les coûts de gestion de lenvironnement sur un chantier. Les fiches dopération jointes en sont des illustrations.
Mais le recours à ces options ne se décrète pas sans réflexion, ni préparation, et nécessite dimpliquer lensemble des acteurs de la construction dans cette voie. Leurs rôles doivent être redéfinis de façon à partager les responsabilités quelles soient techniques ou économiques.
Les acteurs concernés
En tant que commanditaire, le maître douvrage ou son conducteur dopération peut influer fortement sur le déroulement du chantier. Déchets, bruits, poussières et produits polluants seront notablement diminués si lengagement du maître douvrage à réduire ces nuisances est clairement affiché et soutenu par lattribution des moyens nécessaires. Des prescriptions à caractère environnemental doivent être formalisées dans son cahier des charges, son programme et les documents contractuels de ses prestataires. Les entreprises choisies doivent être sensibles à ces problèmes.
Les conditions doptimisation de la gestion environnementale des chantiers se préparent dès lamont. Chaque phase est concernée comme le résume le tableau ci-dessous.
Maîtrise douvrage |
Maîtrise duvre |
Entreprises |
|
Faisabilité |
X |
||
Programme |
X |
||
Choix du concepteur |
X |
||
Études conception |
X |
X |
|
Choix des entreprises |
X |
X |
X |
Préparation de chantier |
(X) |
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La maîtrise duvre a un rôle charnière quelle ne saurait jouer sans lengagement des deux autres catégories dacteurs. Le conducteur dopération et le bureau de contrôle sont à intégrer lorsquils sont présents ; ils doivent être des forces de proposition et de validation
de solutions. Les entreprises, qui aujourdhui disparaissent dès la réception, devront peut-être dans lavenir assurer la maintenance et lentretien du bâtiment quelles ont construit. Pourrait être envisagé un "carnet de santé-environnement" que les différents propriétaires se transmettraient et que les entreprises consulteraient et complèteraient au fur et à mesure de leurs interventions tout au long de la vie du bâtiment. Lexemple de lamiante est un précédent dont les conséquences sur la santé et les budgets sont trop lourdes pour ne pas influer sur lorganisation future des processus de construction.
Quels changements introduire ?
Les trois niveaux dintervenants sont donc étroitement liés. La maîtrise duvre détient une position clé, avec un double rôle de conseil du maître douvrage et de suiveur du chantier. Elle semble la mieux placée pour coordonner la gestion de lenvironnement dans les différents stades de la construction, car elle intervient sur le chantier de la conception à la réception et a un contact direct avec tous les intervenants en amont et en aval. Ces nouvelles responsabilités peuvent assez facilement sintégrer dans le cadre de sa mission habituelle.
Le pilote, le conducteur dopérations, le conducteur de travaux de lentreprise générale ou du mandataire du groupement, le coordonnateur santé-sécurité sont bien sûr aussi directement concernés.
Le recadrage de la mission, et donc de la rémunération de chacun des acteurs, doit être contrebalancé par des gains. Ceux-ci sont générés soit directement sur dautres postes, soit par la disparition des coûts masqués de non-qualité.
Un maître douvrage responsable et impliqué
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Le maître douvrage est le point de départ de la maîtrise des nuisances environnementales des opérations de construction. Instigateur et responsable du projet dans son ensemble, il peut faire participer les services municipaux à cette prise en compte, intégrer des objectifs environnementaux dans le processus de sélection de la maîtrise duvre et des entreprises, etc. Les solutions et les idées seront souvent apportées par les entreprises mais le maître douvrage doit leur donner les moyens de les rechercher, et prévoir leur suivi et contrôle. Le maître douvrage doit aussi veiller au respect des obligations réglementaires. Mais respecter la réglementation ne doit être quun plancher sur lequel prendre appui pour aller plus loin et obtenir des résultats plus satisfaisants dun point de vue économique et environnemental.
Dans la phase programmation
Lenvironnement fait aujourdhui partie intégrante de la programmation. Il devient un des critères de validité sur lopportunité même du projet, avant de sinterroger sur sa faisabilité. Dès les phases pré-opérationnelles, le maître douvrage doit planifier ses cibles et mettre en place une concertation afin que les nombreux intervenants puissent communiquer.
Lors des études dopportunité et de pré-faisabilité, le maître douvrage étudie dans les différents scénarios envisagés lensemble des contraintes propres aux sites potentiels de la future construction telles quaccès, nature du sol, règlement durbanisme. La solution retenue doit tenir compte de ces éléments, qui devront être clairement formulés en terme dobjectifs lors du lancement de lopération.
Ces objectifs doivent être poursuivis dans les études de faisabilité au même titre que les questions de coûts et de délais. Il est alors possible de réaliser une sorte "détude dimpact" du futur bâtiment, au regard des nuisances que sa réalisation est susceptible dengendrer, en y incluant les actions correctives potentielles déjà identifiables notamment grâce aux contacts avec les collectivités locales.
A linitiative du maître douvrage, les riverains du projet ou toute personne susceptible dêtre concernée par ses impacts environnementaux peuvent être associés dans la phase de programme. Cela peut être loccasion, pour le maître douvrage, de communiquer autour de son projet et davoir un retour direct sur la perception de son ouvrage par la population locale, douvrir un dialogue avec les riverains et de les impliquer dans le processus de lopération.
Témoignage : Brigitte GUIGOU - sociologue au CSTB,
Chantier Vert dHellemmes
Nuisances annoncées sont à moitié pardonnées
"Les responsables du chantier souhaitaient cerner les inquiétudes amont des riverains puis les problèmes réellement soulevés. Ils étaient ouverts à toutes suggestions.
A cet effet une enquête a été menée auprès dune vingtaine de personnes du voisinage, puis deux réunions ont été organisées, avant et pendant le chantier, avec des habitants et des travailleurs riverains.
Ces actions ont désamorcé les problèmes ; les participants ont servi de relais avec le voisinage, un courant de convivialité sest créé. En outre, les riverains ont eu, en permanence sur le chantier, un interlocuteur issu de lentreprise générale, qui sest largement impliqué dans cette démarche.
Par ailleurs, ces contacts ont démontré que les riverains étaient moins sensibles aux bruits quà dautres nuisances : poussières, circulation, sécurité, brouillage des émissions et quil est important de les informer sur les types de travaux, les délais,
le futur bâtiment et ses habitants..."
Choisir la maîtrise duvre
Quel que soit le mode de sélection des équipes de maîtrise duvre, les présélectionnées doivent être sensibilisées aux enjeux environnementaux du projet.
Le dossier de consultation comprend alors, outre les exigences environnementales spécifiques du programme, la définition de la mission de maîtrise duvre. Des éléments de mission "environnement" peuvent y être intégrés ; ils devront être repris dans le contrat, plus particulièrement dans le CCTP correspondant (cf. "le suivi des prescriptions environnementales").
La maîtrise douvrage organise souvent des réunions préparatoires "questions-réponses" ou dinformation avec les candidats ; celles-ci sont des moments privilégiés pour une sensibilisation.
Prévoir le suivi des prescriptions environnementales
Afficher une volonté forte en matière de prescriptions environnementales na de sens que si ces attentes sont traduites dans la consultation des entreprises et si un suivi des exigences retenues, par lencadrement du chantier, est prévu.
Compte-tenu du nombre dintervenants déjà très important sur un chantier et de la complexité dune opération de construction, il nest pas question dintroduire un nouvel intervenant du type "homme vert". La solution la plus pertinente semble détendre la mission dun des acteurs déjà en place et présent pendant toute la durée du chantier.
Le maître duvre ou le pilote paraissent les mieux positionnés pour le suivi environnemental cette nouvelle fonction est compatible avec leur mission habituelle de suivi du chantier et de gestion des interfaces entre acteurs.
Quel que soit lintervenant retenu, il est essentiel que le maître douvrage ait prévu lextension de sa mission dans son cahier des charges.
Le coordonnateur santé-sécurité
Définie par la Loi 93-1418 du 31 décembre 1993 et par le Décret dapplication 94-1156 du 26 décembre 1994, la mission du coordonnateur "SPS" intègre des préoccupations environnementales :
conditions de circulation des véhicules et des personnes sur le chantier,
conditions dévacuation des déchets,
suppression ou maîtrise des nuisances pouvant porter atteinte à la santé des travailleurs, telles que bruit, émanations et poussières, substances et produits toxiques ou dangereux, etc.
Les mesures de prévention correspondantes doivent être définies dès la phase de conception puis intégrées au Plan Général de Coordination joint aux marchés de travaux.
Le coordonnateur "SPS" est donc un partenaire incontournable de toute démarche de qualité environnementale du chantier. Mais le suivi dune telle démarche volontaire du maître douvrage dépasse les limites du cadre légal qui détermine le contenu de sa mission.
Le suivi environnemental a pour objet de vérifier que les engagements du maître douvrage et des entreprises sont bien respectés et de permettre une optimisation constante pendant le chantier des solutions envisagées. Une évaluation en cours et en fin de chantier, pour rectifier les dérives et faire le point des aspects positifs et négatifs, apparaît extrêmement utile. Elle permet aux différents partenaires daméliorer, en temps réel, les conditions de gestion du chantier et de capitaliser leurs expériences pour les reproduire. Elle est indispensable aux futures préparations de nouveaux chantiers.
Le chantier vert de Besançon a été loccasion de mettre au point un outil dans ce but : un plan environnement. Inspiré des plans de coordination et des plans qualité, ce document, évolutif, permet une adaptation permanente sur la durée du chantier des moyens mis en uvre pour optimiser la gestion de la qualité environnementale du chantier.
Pour être pleinement efficace, le suivi doit se poursuivre tout au long du chantier, notamment quand interviennent des entreprises sous-traitantes dont les contraintes varient selon le corps détat auquel elles appartiennent.
Quand il y a des sous-traitances en cascade sur lesquelles le maître douvrage na plus de lisibilité, un suivi officiellement prévu et connu de tous les intervenants du chantier doit permettre à lentreprise titulaire de prendre les dispositions nécessaires dans ses relations avec ses sous-traitants (contrats, suivi sur chantier), pour que les engagements pris avec la maîtrise douvrage soient effectivement respectés.
Le contrôle hors chantier de lacheminement des déchets vers des lieux autorisés ne relève pas des devoirs du maître douvrage, qui na pas à se substituer au pouvoir de police (notamment pour les déchets dangereux). Cependant, la signature par le centre de réception des déchets dun bordereau de suivi, à remettre par lentreprise à la maîtrise douvrage, serait un garde-fou contre les mauvaises pratiques et une protection contre déventuels problèmes ultérieurs. Il sagit dune démarche volontaire à linitiative du maître douvrage.
Le relais de la maîtrise duvre
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Si le maître douvrage arrive le premier dans la liste des acteurs, les allers et retours
entre lui et sa maîtrise duvre (avec toutes ses composantes : architecte, BET, économiste...) mettent en valeur le devoir de conseil que léquipe de maîtrise duvre doit exercer. La complexité croissante des missions renforce le rôle de meneur déquipe que la maîtrise duvre peut jouer sur le chantier. Dans bien des cas, les modifications des pratiques sur le chantier, concernant lenvironnement, passeront par une sensibilisation des maîtres duvre et des économistes. Ceux-ci devront ensuite être un relais fort dinformation et de sensibilisation notamment auprès des entreprises encore "novices" sur les thèmes environnementaux.
Le maître duvre doit aussi traduire la volonté du maître douvrage. Il rédige les cahiers des charges techniques, en introduisant les changements induits par une nouvelle façon de considérer le chantier. En matière de déchets, la modification des réglementations na pas suffi à modifier les habitudes ; actuellement, les CCTP types ne font aucunement mention des déchets sauf en indiquant que le maître douvrage peut faire intervenir une société de nettoyage aux frais de lentreprise négligente qui na pas évacué et nettoyé ses gravois (en application de la recommandation T1-91 de la Commission Centrale des Marchés).
Par ailleurs, la pollution des sols et des eaux par le chantier nest pas réprimandée jusquà présent mais pourrait lêtre dans un avenir proche, ces questions étant déjà portées devant les tribunaux dans dautres pays européens.
Léquipe de maîtrise duvre ne peut investir dans lenvironnement quavec laccord du maître douvrage. Elle doit le rendre sensible à lobligation de consacrer plus dattention, de temps et de moyens quauparavant à la gestion des déchets, à la réduction du bruit, des poussières et des pollutions pour les hommes ou pour lenvironnement. Elle doit aussi mettre en évidence les gains attendus sur dautres postes.
Consultations et documents contractuels
Le maître douvrage doit relayer son engagement vis-à-vis de lenvironnement, auprès des entreprises, par la maîtrise duvre qui rédige les documents du marché.
Dans le dossier de consultation des entreprises (DCE), des demandes spécifiques concernant lenvironnement doivent apparaître. Elles peuvent se traduire par la nécessité de voir figurer dans les réponses des entreprises tous les éléments permettant de :
1 - chiffrer dans un descriptif détaillé le coût de la gestion des déchets (tri, transport, élimination) ;
2 - réduire le volume des déchets produits ;
3 - trier pour réduire les frais délimination des déchets ;
4 - préparer et organiser le chantier par rapport au tri ;
5 - diminuer les nuisances aux riverains telles que bruits, poussières, salissures, augmentation de la circulation et difficultés de stationnement ;
6 - diminuer les pollutions des sols et des eaux causées par le chantier, en utilisant des produits ou techniques "propres".
Le choix de ces éléments est fonction de chaque chantier et des contraintes qui sy rapportent.
Lattention des entreprises est ainsi mobilisée sur des exigences environnementales claires et une même règle du jeu pour tous. Il nest pas question dun "critère environnemental" supplémentaire et plus ou moins optionnel mais dune demande intégrée à lacte de construire.
Ces exigences doivent être intégrées dans les CCAP et les CCTP et déclinées dans les différents chapitres des contrats : celui de la maîtrise duvre pour le suivi (cf. paragraphe "suivi des prescriptions"), celui des entreprises soumissionnaires pour chacun des lots.
Cest ensuite à ces entreprises soumissionnaires de promouvoir leur compétence et leurs solutions dans leurs offres.
Une réflexion est en cours au Ministère de lÉquipement, du Logement, des Transports et du Tourisme pour mettre en place des outils de prescription tels que des clauses types à introduire dans les modèles de CCTP et CCAP existants pour les marchés publics.
Dans les marchés privés, les maîtres douvrage se conforment généralement au CCAG proposé par la norme NF P 03-001, adapté du CCAG des marchés publics. Mais ils sont libres dy ajouter ou den retirer des clauses ou de préparer leurs propres documents contractuels.
Le CCAG-travaux envisage une période de préparation pendant laquelle maître douvrage, maître duvre et entreprise prennent les dispositions préparatoires à lexécution des travaux. Une gestion améliorée de lenvironnement du chantier pourrait se loger dans ce cadre (cf. "la préparation de chantier").
La modification des pièces contractuelles est une façon simple et accessible pour entraîner un changement des pratiques des entreprises et pour améliorer la gestion environnementale des chantiers. Chaque maître douvrage a lopportunité de moduler et rédiger ces documents en fonction de ses objectifs, de ses priorités et de ses contraintes, dans le cadre réglementaire existant.
Le maître duvre face aux déchets
La maîtrise duvre peut faire un choix dès le DCE, en accord avec le maître douvrage, quant aux modes de gestion des déchets.
Elle peut par exemple envisager de créer un lot spécifique déchets. Cette méthode na pas été testée dans les REX Chantiers Verts mais dautres expériences tendent à mettre en évidence la difficulté de gérer un tel lot. Des outils de quantification des déchets, adaptés aux chantiers, ne sont pas encore disponibles et les maîtres douvrage ne sont, pour linstant, pas assez armés pour évaluer les réponses à ce lot. De plus, un tel lot doit entraîner laffichage de moins-values pour les entreprises de travaux, ce qui est difficile à mettre en place.
Une autre solution consiste à confier lensemble de la gestion logistique des déchets, sur le chantier, à lentreprise générale ou au mandataire du groupement, ce qui a été fait sur les Chantiers Verts. Les résultats sont bons dès lors que lentreprise simplique suffisamment, notamment dans les interfaces avec les entreprises de second uvre (cf. "le positionnement des entreprises").
Quelle que soit la solution retenue, elle tend à faire sortir la gestion des déchets du compte interentreprises (cf. chapitre sur la préparation de chantier). Le choix dune solution peut dépendre du mode de dévolution des marchés et de lestimation faite en amont du chantier des volumes, natures et coûts liés aux déchets.
Cette estimation implique larchitecte dans la recherche dune réduction des volumes des déchets, selon les caractéristiques architecturales du bâtiment et les matériaux choisis : calepinages, matériaux ou produits générant peu de déchets, non toxiques, recyclables, etc. Elle renseigne en outre sur lintérêt dun tri et selon quels principes.
Le repérage des Déchets Industriels Spéciaux (DIS), comme lamiante lors des déposes en réhabilitation ou comme certains bois traités, peut être intégré dans le CCTP. Certains déchets, comme le plâtre, pourraient à lavenir nécessiter un stockage spécifique ; cette exigence sera alors utilement introduite dans un document contractuel.
Conception des bâtiments et environnement
La prise en compte de la démolition, au moment de la conception du bâtiment, est une démarche analogue à celle attendue des industriels sur les emballages de leurs produits. Cependant, elle concerne les démolitions qui seffectueront dans un demi-siècle et nul ne peut dire quelles seront les conditions de la démolition et de la valorisation en 2050 ou 2100.
Par ailleurs le maître duvre peut aussi intégrer lenvironnement dans la conception des bâtiments sous de nombreux autres aspects (détaillés dans le document sur les REX HQE, Haute Qualité Environnementale, du PCA et du CSTB) : gestion de leau, performances thermiques, insertion dans lenvironnement immédiat, produits et matériaux non nocifs envers lenvironnement, etc.
Le rôle et le positionnement des entreprises
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Responsables de la réalisation des travaux qui leur sont confiés, les entreprises doivent mettre en uvre toutes les solutions techniques propres à réduire les gênes à lenvironnement.
Lintroduction de prescriptions environnementales dans leur cahier des charges va transférer sur elles un certain nombre dexigences quelles devront respecter dans le cadre réglementaire (environnement, travail, santé...) en vigueur.
Cela implique, dès maintenant, une réflexion de leur part sur ladaptation de leur méthodes et outils de travail et de leur organisation pour mieux répondre à ces nouvelles demandes.
Les obstacles
La nouveauté
Les préoccupations environnementales obligent à une préparation plus complète des projets et à choisir les entreprises sur des éléments de réponse encore inhabituels. Lintérêt des entreprises à participer à une telle démarche est primordial car lenvironnement fait appel aux idées neuves.
La difficulté destimer les coûts concernant les déchets de façon fine est lun des handicaps au développement de leur valorisation. Les ratios de chutes par types de produits commencent à être connus mais beaucoup dentreprises ne savent pas ce quelles produisent exactement comme déchets. Elles ignorent les débouchés, les coûts ou les gains des filières, le surplus de temps et de main duvre nécessaires au tri, etc. La mise en place de nouvelles filières délimination et de valorisation, déjà variables selon les régions, est compliquée par la séparation des corps détat, lensemble des déchets nétant pas forcément géré par une seule entreprise.
Par ailleurs, pour répondre à une volonté de réduire les nuisances sonores, les entreprises retenues seront celles qui connaissent le niveau de bruit de leurs machines, les entretiennent, séquipent dengins plus silencieux, ont réfléchi à de nouvelles façons de travailler et se préoccupent des conditions de travail de leurs compagnons.
La dévolution des marchés et la sous-traitance
Lengagement dune entreprise générale ou du mandataire dun groupement dentreprises nest quun début. Les sous-traitants et les entreprises du groupement ou de chaque lot doivent aussi se sentir concernés, laccepter dans leur contrat, sensibiliser leur personnel. Le travail pédagogique et une coordination avec les sous-traitants pour un respect des consignes ne doivent pas être sous-estimés. Les expérimentations "Chantiers Verts" montrent quon ninsiste jamais assez sur les procédures nouvelles et quil nest pas toujours facile de les faire accepter. Le nettoyage du chantier et la limitation des poussières supposent également de nouvelles façons de sorganiser et de travailler.
A cet effet, les sous-traitants doivent être invités à participer aux discussions délaboration des procédures ou être informés de celles-ci lorsquils arrivent en cours de route. Ces procédures doivent pouvoir sintégrer dans un cadre souple qui permettrait de prendre en compte leurs contraintes spécifiques.
Témoignage : Patrick Martin - BETREC - Suiveur Régional
Chantiers Verts de Chambéry et Voglans
"Le pré-tri des déchets sur un chantier doit sinscrire dans les gestes des compagnons, afin de respecter les usages. Une approche théorique, qui nintégrerait
pas assez la logistique du chantier et les pratiques des compagnons, conduirait à
un échec.
Lenjeu doit être clairement exprimé, puis le chantier doit être programmé et organisé de façon à pouvoir le concrétiser : limiter le tri aux déchets aisément reconnaissables, afficher des pictogrammes sur les bennes, concevoir le pré-tri en fonction de chaque corps détat...
La réussite du pré-tri dépend aussi du type de chantier et de bâti, et des filières de recyclage. Si le flux est assez important, une récupération par des entreprises de tri spécialisées peut être envisagée."
Certaines méthodes de travail sont à adapter, comme celle du travail à la tâche. Payé au m2 effectué, le tâcheron na aucune envie de ralentir sa cadence et de diminuer sa rémunération pour trier (voire simplement ramasser) ses déchets.
Il faut veiller à ce que linformation atteigne bien les hommes du terrain qui seront chargés dexécuter les consignes ; il est bon de les motiver en annonçant dès le départ quun bilan sera réalisé en fin détape ou de chantier.
En effet, dune manière générale, les entreprises sous-traitantes ont manifesté quelques réticences à sinsérer dans les programmes expérimentaux. Soit leur intérêt financier pour ces évolutions est moins conséquent que celui des entreprises générales, soit elles nont pas été consultées suffisamment en amont pour avoir la possibilité de proposer leurs propres solutions et elles se retrouvent alors devant un fait accompli qui les désavantage.
La formation in situ peut aussi moins bien fonctionner en cours de chantier quau début, les entreprises sous-traitantes ne bénéficiant pas alors dautant dattentions que les premiers intervenants.
Atouts pour le futur
Que les entreprises soient mandataires, co-traitantes ou sous-traitantes, leur organisation doit être compatible avec les nouvelles exigences environnementales. Peu dentre elles ont une expérience dans ce secteur mais elles doivent toutes au minimum souhaiter lacquérir, avec laide du maître douvrage et du maître duvre. Une réflexion en amont du démarrage du chantier semble indispensable, en incluant le maximum dentreprises participantes. Les enseignements retirés par les entreprises qui ont participé à lexpérimentation Chantiers Verts sont positifs aux plans relationnels et professionnels. Il revient maintenant aux entreprises dêtre conscientes des enjeux environnementaux et de développer les nouvelles compétences quils nécessitent.
Lengagement du maître douvrage est le gage que lentreprise dispose désormais dune reconnaissance officielle des enjeux des nouvelles réglementations concernant les déchets, et donc des coûts potentiels. Elle ne risque plus dêtre pénalisée face à des concurrents moins scrupuleux et de perdre un marché en affichant des prix qui intègrent le coût légal de lélimination des déchets.
De plus, lentreprise qui investit dans lenvironnement facilite les conditions de travail de ses employés et protège leur santé, ne serait-ce quen privilégiant des équipements et matériels adaptés et bien entretenus. A lavenir, les mesures de protection des travailleurs et damélioration des conditions de travail du bâtiment pourront contrebalancer la réputation dont pâtit parfois le monde de la construction et attirer plus de jeunes vers des professions quils dédaignent aujourdhui.
Témoignage : Philippe Cornette - AUXIAL - Entreprise de travaux
Chantier Vert de Montpellier
Une nouvelle compétence des entreprises
"Nous constatons que bon nombre dentreprises sous-traitantes ne récupèrent pas leurs déchets. Sur ce chantier, elles devaient simplement mettre leurs déchets en bas des cages descalier. Ceux-ci étaient triés par trois personnes habitant sur le site, embauchées dans le cadre dune insertion par léconomique. Faire appel à des personnes de la cité HLM a permis une absence de problèmes et de dégradations.
Les déchets ont été ensuite valorisés dans des filières locales. Les prestataires de service en matière de déchets maîtrisent mieux les évolutions de la réglementation et ont les supports techniques plus adaptés que les entreprises du BTP.
Ce chantier vert nous a donné loccasion de mettre en avant, en tant quentreprise générale, une nouvelle compétence. Nous pensons cependant que le traitement des déchets est plus facilement applicable sur les chantiers de réhabilitation où le travail se fait en séquentiel."
Le trio Qualité, Sécurité, Environnement
Intègrer la gestion de lenvironnement dans le process de construction dune entreprise relève dune démarche spécifique. Cela peut revaloriser limage de lentreprise, faire partie de sa "culture", la différencier de ses concurrents, lamener à évoluer en appréhendant de nouvelles façons de travailler et denvisager ses métiers.
Cependant lexpérience a montré que les actions "environnementales" tendent à conforter celles mises en uvre dans le domaine de la qualité ou de la sécurité. Il ny a pas de recette miracle mais des méthodes adaptées aux ambitions et aux moyens de chacun. Les plans qualité et les préparations de chantier sont des outils dont chaque entreprise se dote et quelle enrichit au fur et à mesure de la progression du chantier et de lexpérience accumulée sur lensemble de ses réalisations dans un souci de limiter les risques et aléas liés à lacte de bâtir. Il sagit de "faire bien du premier coup" pour maîtriser les coûts et les délais.
Un moment capital : la préparation du chantier
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En construction neuve, la période de préparation traite de bien dautres problèmes que ceux des déchets, des polluants, de lacoustique ou de la production de poussières. Linfluence dun encadrement motivé par lenvironnement est ici absolument décisive.
Il peut être difficile pour larchitecte dexprimer les solutions précises attendues des entreprises pour améliorer lenvironnement du chantier et il est donc indispensable quait lieu une concertation afin de faire émerger les actions réalisables. Celles-ci varieront selon les spécificités de chaque chantier et les moyens de chaque entreprise. Les fiches des opérations décrites à la suite de ce document illustrent cette diversité.
Le choix dune technique de construction (voiles ou poteaux-poutres par exemple), dun matériau ou dun produit nest neutre vis-à-vis ni des déchets engendrés, ni de lacoustique ou de la génération de poussières. Beaucoup de points sont donc à prendre en considération pour réduire le volume et le poids des déchets, faciliter leur tri, optimiser leur valorisation, le tout avec un minimum de bruit et de pollution. Les solutions élaborées doivent être préparées avec soin et en concertation, de manière à faciliter leur mise en uvre et de raccourcir les délais de réalisation, en évitant des erreurs et des incertitudes. Les expérimentations "Chantiers Verts" apportent de premiers enseignements sur ce type de démarche.
La préparation de chantier et les déchets
Plusieurs possibilités de gestion des déchets de chantier coexistent actuellement :
le cas le plus classique : la gestion des déchets de chantier est intégrée dans le compte
interentreprises. Chaque entreprise sacquitte dun montant calculé non sur le volume ou
la toxicité de ses déchets mais proportionnellement au montant de ses travaux; sa quotepart est donc indépendante des déchets générés. Ce principe nincite pas à des comportements responsables vis-à-vis des déchets, notamment pour les entreprises ayant en charge des lots dont le montant est relativement peu important par rapport au marché global mais dont les volumes de déchets et leur coût délimination représentent un pourcentage élevé.
De plus, la question du stockage puis de lélimination est du ressort de lentreprise gestionnaire du compte, qui passe contrat avec une entreprise spécialisée. Les objectifs à atteindre sont alors plutôt dordre financier et, si cette entreprise spécialisée ne subit que peu de concurrence dans sa région, elle peut dicter des conditions sans avoir à se soucier outre mesure de valorisation. Le maître douvrage et son maître duvre sont de toutes façons exclus du processus ;
le cas fréquent où chaque entreprise est responsable de ses déchets et de leur élimination. Ceci se rencontre surtout avec les petites entreprises artisanales qui ont droit parfois à des forfaits dans les installations de stockage (déchetteries) gérées par les municipalités mais le plus souvent elles doivent payer et, voulant éviter cette dépense, emportent et stockent leurs déchets et recherchent dautres solutions pour sen débarrasser. Pour les entreprises génératrices de déchets dangereux, comme celles de peinture, des accords avec les fabricants ou les négociants existent pour la reprise des pots vides lors dune nouvelle commande. Des filières spécifiques à une entreprise ou un corps de métier peuvent également exister, elles méritent dêtre imitées !
Aucune de ces configurations (même si elles ne sont pas optimales. cf. "maîtrise duvre et déchets") nest incompatible avec un tri des déchets. Le maître douvrage peut demander le détail des coûts délimination des déchets dans les devis, sensibilisant ainsi les entreprises à rester dans la légalité. Celles-ci ont dailleurs intérêt à rechercher des solutions plus ingénieuses que la simple élimination (conforme aux lois) qui devrait à terme revenir plus chère quun circuit de valorisation bien organisé. Encore faut-il que ce circuit existe, ce qui est loin de la réalité dans la plupart des régions.
La préparation du chantier doit être mise à profit pour rechercher les centres de tri et les filières de valorisation des déchets afin de définir un niveau de tri optimal ; par exemple il est inutile de séparer le bois des autres déchets sil finit, faute de débouchés, par être envoyé avec les DIB en mélange en classe II. Dautres critères doivent aussi être pris en compte comme le volume des déchets concernés, la place disponible sur le chantier et la difficulté du tri lui-même car certains matériaux sont difficiles à caractériser par les compagnons sur le chantier (les différents plastiques, un bois traité et un bois non traité).
Une analyse des différentes filières disponibles localement permet doptimiser la valorisation des déchets, en attendant un réseau suffisamment développé des filières de
valorisation. Des plans départementaux délimination/valorisation des déchets commencent à être publiés. A moyenne échéance ces plans seront disponibles partout. Larchitecte peut également être un relais pour consulter les organismes de protection de lenvironnement comme lADEME. Enfin, les gestionnaires des centres de tri et de valorisation sont des partenaires qui conseillent sur les choix à effectuer en fonction des filières et de leur rentabilité.
Les industriels peuvent influer sur les qualités environnementales des produits. Ils ont également un rôle à jouer vis-à-vis des déchets de construction, en récupérant leurs emballages après livraison ou usage du contenu, en changeant éventuellement la matière, en améliorant la fonction (emballages réutilisables). Une consultation avec les industriels fournisseurs peut donc amener des perfectionnements dans le colisage et la livraison, inciter à la reprise de chutes propres et concourir à une réduction du volume des déchets.
La préparation de la gestion des déchets du chantier comprend aussi une réflexion sur lemplacement des bennes, leur proximité par rapport au poste de travail, leur délai de rotation, leur signalétique. Les consignes du tri doivent être simples, afin que tous les opérateurs sur le chantier les comprennent et les appliquent, elles ne doivent ni bouleverser les modes de travail, ni être trop pénibles physiquement. La préparation du chantier est loccasion de regrouper des tâches et de prévoir le choix et le planning des engins de levage, qui incluent la manutention des déchets, et de lagencement des façades, balcons, planchers qui simplifie les trajets. Le tri doit être aussi peu que possible consommateur de temps pour ne pas gêner le déroulement du chantier.
La réflexion sur le tri des déchets nest que la seconde partie dune réflexion sur les déchets qui doit dabord se pencher sur leur réduction. Celle-ci a de toute façon pour avantage de diminuer les frais dapprovisionnement, de manutention, de transport et délimination, et elle facilitera un tri éventuel. Cette réflexion sur la réduction des déchets, après les choix architecturaux, concerne les entreprises qui doivent rechercher dautres méthodes dorganisation et de travail pour éviter les erreurs, les gaspillages et les pertes.
La préparation de chantier et le bruit
Pour obtenir une réduction des nuisances acoustiques, la préparation de chantier est primordiale. Elle permet de planifier des solutions acoustiques visant à :
améliorer lapprovisionnement du béton ;
choisir les systèmes de coffrage les plus performants au point de vue acoustique ;
moduler les horaires de travail ;
repenser les réservations à laide de boîtes et systèmes divers ;
organiser et planifier le chantier en envisageant de doubler le nombre des équipements
afin de réduire leur temps dutilisation (le bruit de deux moteurs travaillant de concert ne
sadditionne pas arithmétiquement) ;
déterminer le choix des matériels, des engins de levage etc.
La prise en compte du bruit sur le chantier doit saccompagner dune politique de communication afin que les riverains puissent être informés, en particulier sur la durée prévisible des travaux bruyants et apprécier les efforts entrepris.
La préparation de chantier et les autres nuisances
Lorsque les entreprises sont consultées pour trouver des solutions à un problème denvironnement, elles ont souvent des idées simples et efficaces, des gestes élémentaires qui évitent le gaspillage.
Un dialogue préalable avec les municipalités peut donner loccasion de résoudre les problèmes de circulation et de stationnement posés par le chantier ainsi que les possibilités (contrôlées) de remblais sur des terrains proches pour les terres de terrassement. Un dialogue avec les fournisseurs peut aussi aider à planifier les livraisons : endroits de stockage, conditionnements, reprises. La fabrication sur site du béton pour un gros chantier limite les circulations de camions par rapport à lapprovisionnement en béton prêt à lemploi. Des protections contre les poussières peuvent être prévues lors de la préparation de chantier. Etc.
Les expériences Chantiers Verts ont toutes mis en évidence une convergence des dispositions environnementales vers un accroissement de la sécurité du chantier et une amélioration des conditions de travail des compagnons.
Un chantier propre, rangé et silencieux ne peut de fait quêtre plus sûr pour son personnel quun chantier sale, mal balisé et bruyant.
Bilan et capitalisation des résultats
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A linstar des opérations expérimentales, il est nécessaire, pour des démarches encore novatrices, de faire un bilan en fin de chantier des actions mises en place, pour en évaluer la reproductibilité.
Ce bilan se doit de faire le point sur un certain nombre de critères majeurs parmi lesquels on peut citer :
Les aspects économiques et financiers :
Il est parfois difficile de chiffrer, voire dévaluer, certains éléments tels que le temps passé au tri et plus encore le gain induit sur le bon déroulement de lopération par lamélioration du chantier en "confort", propreté et sécurité. Cependant, il est capital de pouvoir mettre en évidence les plus-values ou les éventuels surcoûts apportés par une meilleure gestion de lenvironnement. Une première hiérarchie des solutions peut être ainsi obtenue dans une optique doptimisation du rapport "qualité-prix" des actions mises en place.
Les aspects techniques :
Il est également important de mettre en évidence les difficultés techniques de mise en uvre de certaines idées et leurs implications sur le chantier, à la fois en terme de logistique et dorganisation (gestion des flux, achat ou location de matériel...). Une telle analyse doit se replacer dans une vision globale de la filière de construction, pour faire ressortir les synergies à mettre en place avec les industriels, par exemple lindustrialisation de certains éléments, le colisage, le recyclage des chutes...
Il est enfin essentiel de vérifier que les actions mises en uvre sont cohérentes entre elles et quelles ne se contrarient pas.
Les aspects des ressources humaines :
Il sagit de pointer limpact des solutions sur les usages habituels du chantier et de
mettre en évidence les conditions dune bonne intégration de ces solutions dans les gestes : nécessité dun encadrement très présent, besoins en sensibilisation-formation et outils
en conséquence (guides, fiches synthétiques...), facilité dacceptation et dassimilation des solutions par les compagnons et les sous-traitants, amélioration des conditions de travail induites...
Toutes les solutions techniques imaginables nauront de sens que si elles rencontrent
ladhésion des différents acteurs du chantier et leur satisfaction globale.
Les aspects réglementaires et la satisfaction des riverains :
Les solutions retenues doivent toutes au minimum être compatibles avec les réglementations en vigueur. Mais au-delà, il est souhaitable de sassurer, auprès des riverains du chantier ou des locataires, que les actions visant à réduire les nuisances du chantier ont bien été perçues positivement. On peut en effet se poser la question de lintérêt dune action novatrice (et donc potentiellement perturbante) si son résultat est passé totalement inaperçu des acteurs mêmes quelle visait !
Conclusion
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Malgré les progrès enregistrés, de nombreux points ont besoin dêtre encore approfondis :
sur les matériels, sur les équipements et leur nombre (intérêt acoustique, réduction des
poussières) ;
sur le développement de filières de valorisation des déchets accompagnant le tri effectué sur les chantiers ;
sur les produits de la construction en incitant les industriels à développer des produits favorables à lenvironnement, des produits et emballages recyclables, récupérables ou faciles à éliminer ;
sur la logistique et lorganisation, le temps nécessaire au changement des pratiques, la formation des compagnons. Il est temps de penser à lintégration dun module "gestion de lenvironnement" dans les formations initiales aux métiers du BTP (les réflexions sont en cours à la FNB et à la CAPEB).
Néanmoins, la balle est désormais dans le camp du monde de la construction pour quil intègre, dans ses habitudes, la gestion de lenvironnement. Pour que cela se fasse en douceur et efficacement, il doit garder à lesprit trois grands principes :
avoir des objectifs raisonnables et bien préparés avant la réalisation ; ils doivent notamment être compatibles avec la taille du chantier, celle des entreprises intervenantes (artisans, PME/ entreprise générale...), le mode de dévolution des marchés et le contexte local.
insister sur la coordination, linformation et la formation, qui ont tendance à sessouffler en phase second uvre.
prévoir un suivi des actions environnementales tout au long du chantier afin quelles ne sarrêtent pas à la fin du gros uvre et imaginer des dispositifs de contrôle légers et faciles à mettre en place.
Afin de mieux accompagner les professionnels de plus en plus sensibles à cette démarche, de nouveaux outils et réflexions sont déjà lancés par la Direction de lHabitat et de la Construction, avec le soutien de ses partenaires publics et privés :
deux outils damélioration de la prescription en matière de démolition sélective avec la FNB et lADEME ;
un logiciel de quantification et de gestion des déchets par chantier avec la FNB et lADEME ;
un document sur les "Chantiers silencieux" avec lADEME et le CSTB ;
un document sur la planification locale spécifique aux déchets de chantier avec le Ministère de lEnvironnement, lADEME, la FNB, la CAPEB et le CSTB ;
une réflexion sur les documents contractuels, à assurer en liaison avec la Commission Centrale des Marchés.
Lengagement des pouvoirs publics ne savère efficace que sil rencontre la volonté dun engagement similaire de la part des maîtres douvrages, des équipes de maîtrise duvre, des entreprises et de lensemble des professionnels, qui concourent à lactivité de la construction. Lexpérimentation Chantiers Verts a mobilisé des équipes dynamiques et inventives et a permis de développer un courant fort de mobilisation sur ce thème. Elle se traduit par un engagement croissant des professionnels aussi bien sur les chantiers que dans les différentes instances locales qui travaillent à améliorer les conditions globales dune meilleure gestion de lenvironnement dans le monde du BTP.